Après Paris, Lyon et plusieurs grandes villes de France, Mulhouse surfe à son tour sur la vague du CBD, ce cannabis "light" sans effet psychotrope. Deux magasins viennent d'ouvrir et trois autres ouvertures sont annoncées dans les prochaines semaines dans la cité du Bollwerk.
Fleur de cannabis, infusions, pollen ou huile à base de chanvre, des produits qui fleurent bon le coffee shop et pourtant en vente libre chez nous. Les magasins proposant ces produits dérivés du cannabis "légal" ont poussé comme des champignons en France ces dernières semaines. Deux magasins ont ouvert le bal en Alsace, tous les deux à Mulhouse en plein centre-ville, l'un au 13 Avenue du Maréchal Foch et l'autre à peine plus loin au 21 Rue Louis Pasteur. Trois autres devraient suivre prochainement. Apparemment le commerce du cannabis sans substance psychoactive fait recette mais il bénéficie surtout d'une faille légale.
Ces produits présentent très peu de THC (tétrahydrocannabinol), moins de 0,2%, et une forte concentration en CBD (cannabidiol). En France, c’est la consommation de THC qui est prohibée, pas le CBD. Le droit règlemente le chanvre, la plante dont il est issu. Le THC étant considéré comme stupéfiant, l’article R. 5132-86 du code de la santé publique dispose que « sont interdits la production, la fabrication, le transport […] de cannabis, de sa plante et de sa résine, des produits qui en contiennent ou de ceux qui sont obtenus à partir du cannabis, de sa plante ou de sa résine ». Le CBD, qu’il soit présenté sous forme de fleur, d’huile ou de produits alimentaires, n’a pas d’effet stupéfiant sur le consommateur. Autrement dit, pas d’effet "défonce" similaire à celui procuré par le THC.
Quel avenir pour le CBD ? Pas forcément rose pour ce cannabis qui ne fait pas rire. La ministre de la santé, Agnès Buzyn, veut en effet mettre un frein à ce commerce et estime même que ces magasins auront fermé d'ici quelques mois. Elle a déclaré le 17 juin 2018 sur l'antenne de RTL (à partir de 8'10): "Ces coffee shops se sont ouverts sur une zone grise du droit. Le droit dit que le chanvre peut être utilisé à des fins industrielles quand il contient moins de 0,2% de THC. Mais il ne parle pas de produits vendus sous forme de cigarettes, mais de la plante elle-même. Or ces magasins détournent le droit en disant que leurs cigarettes contiennent moins de 0,2% de THC".
Hugo Bosc, vendeur au Purple Taste, un des deux magasins qui a ouvert à Mulhouse, lui, y croit dur comme fer et se pique même d'être dans les clous: "on n’a pas le droit de vendre ce produit en tant que produit fumable, on na pas le droit de dire aux gens que ça se fume, après les gens font ce qu’ils veulent. Pour les effets, on peut dire que ça relaxe, que ça aide à l’endormissement comme une tisane mais on n’a pas le droit de parler d’effets thérapeutiques."
Emmanuelle Kueny vendeuse au CBD360, l'autre magasin spécialisé de Mulhouse, met l'accent sur l'aide à l'arrêt du cannabis traditionnel (chargé en THC) que peut représenter le CBD : « vous avez des gens qui cherchent le côté thérapeutique, qui sont un petit peu angoissés, vous avez une clientèle qui prête un peu plus à la controverse c’est la clientèle qui vient fumer le CBD c’est des gens qui cherchent à arrêter le traditionnel, qui cherchent un effet placebo qui peuvent les détendre un petit peu sans avoir le côté défonce ».Un client du Purple Taste dit prendre du CBD pour des problèmes de sommeil, d'insomnie: "On m'a dit que ça peut m'aider, comme c'est légal pour le moment autant en profiter". Le Comité OMS d’experts de la pharmacodépendance a conclu en novembre 2017 que: "Le cannabidiol est l’un des nombreux (probablement 200) composés de la plante de cannabis. A l’état pur, le cannabidiol (CBD) ne semble pas présenter de potentiel d’abus, ni être nocif pour la santé."
Le reportage de France 3 Alsace